J-L David: étude pour le Serment des Horaces
anonyme (précédemment attribué à David) Torse de Guerrier(Salins-les-bains)
L’œuvre de Jacques-Louis David reflète toutes les évolutions du nu, sous l’ancien régime et la révolution, du maniérisme roccoco qui cache sagement les sexes, allant jusqu’à les enlever des dessins lorsqu’on ne peut les couvrir, jusqu’au triomphe du retour à l’antique, prônant le nu intégral à la grecque même dans les représentations de l’histoire latine. David, avec l’Enlèvement des Sabines définit même le statut du nu académique pour le 19è siècle, tel qu’il survivra à la période réactionnaire de l’empire où la peinture d’histoire, appliquée aux sujets contemporains, se rhabille. Les poses héroïques se figent dans une immobilité déjà photographique qui emprunte au théâtre et l’inspire à son tour.
Les plus célèbres des petits formats de Jacques-Louis David en ce qui concerne les nus d'ateliers sont les deux académies dites d'Hector (face) et Patrocle (dos)
peut-être par référence au grand tableau des Funérailles de Patrocle dont ils ne sont pourtant pas des études.
(ci-dessus)Trois détails des Funérailles de Patrocle.
Le dessin n'est pas une fin en soi pour David et les exemples de dessins achevés, ou du moins "soignés" sont assez rares:
Ils constituent des essais de jeunesse, destinés à des tableaux peut-être inachevés, comme l'Alexandre d'Apelle peignant Campaspe
Au contraire les carnets d'études sont remplis de dessins rapides
parfois d'après l'antique
destinés à servir, selon la méthode de Lebrun à des compositions de grande ampleur.
Le procédé culmine dans Léonidas aux Thermopyles, dont il faut rappeler que la première idée date de 1799, même si David ne l’acheva qu’après la première abdication de Napoléon dont les commandes furent prioritaires et qui, sous le Consulat, avait tenté de dissuader le peintre de s’intéresser à des vaincus. La même technique est à l’œuvre dans les études pour Le Serment du jeu de paume, dont les personnages seront ensuite vêtus:
On dit que c’est en partie à cause de la gêne qu’il éprouvait de devoir recourir au costume moderne pour un tableau d’histoire que David n’acheva jamais le Serment du Jeu de Paume, puisqu’il avait entrevu la lumière de la nudité antique durant son deuxième séjour italien, dont Les Sabines fut le manifeste.
Lors de l’exposition (payante) des Sabines, David rédige à l’intention du public une Note sur la nudité de mes héros :
« Une objection qu'on m'a déjà faite, et qu'on ne manquera pas de reproduire, c'est celle de la nudité
de mes héros... C'était un usage reçu parmi les peintres, les statuaires et les poètes de l'antiquité, de
représenter nus les dieux, les héros, et généralement les hommes qu'ils voulaient illustrer. Peignaient-ils
un philosophe ? il était nu, avec un manteau sur l'épaule, et les attributs de son caractère. Peignaient-ils
un guerrier ? il était nu, le casque en tête, l'épée attachée à un baudrier, un bouclier au bras, et des
brodequins aux pieds; quelquefois ils y peignaient une draperie, quand ils jugeaient qu'elle pouvait
ajouter à la grâce de sa figure : ainsi des autres… comme on le voit dans mon Tatius, ou, pour mieux
dire, comme on pourra l'observer incessamment au Musée central des arts, dans la figure de Phocion,
nouvellement arrivée de Rome. Ne sont-ils pas nus, les deux fils de Jupiter, Castor et Pollux, ouvrages
de Phidias et de Praxitele, qui se voient à Rome , à Monte-Cavallo ? L'Achille, à la villa Borghese, est
également nu. A Versailles, on voit sur le vase appelé de Médicis un bas-relief représentant le sacrifice
d'Iphigénie: Achille y est également nu, ainsi que la plupart des guerriers qui sont autour du vase.
On peut voir chez le statuaire Giraud, dans son musée, place Vendôme, le bas-relief de Persée et
d'Andromède. Le héros y est nu, quoiqu'il vienne de combattre un monstre qui lance le venin.
On trouvera de même à la bibliothèque nationale, dans le livre des estampes d'Herculanum, le sujet du
départ d'Hippolyte pour la chasse, en présence de Phèdre; il est nu. Et combien d'autres autorités ne
pourrais-je pas citer encore! Celles que je viens de rapporter suffiront sans doute pour que le public ne
s'étonne pas que j'aie cherché à imiter ces grands modèles dans mon Romulus, qui lui-même est fils d'un
dieu. Mais en voici une que j'ai réservée pour la dernière, parce qu'elle est le complément de toutes les
autres: C'est Romulus lui-même qui est représenté nu sur une médaille, au moment où , après avoir tué
Acron, roi des Céninéens, il porte sur ses épaules un trophée formé de ses armes, qu'il déposa ensuite
dans le temple de Jupiter Férétrien; et ce furent là les premières dépouilles opimes. Actuellement que je
crois avoir répondu d'une manière satisfaisante au reproche que l'on m'a fait, ou qu'on pourra me faire,
sur la nudité de mes héros, qu'il me soit permis d'en appeler aux artistes. Ils savent mieux que personne
combien il m'eût été plus facile de les habiller : qu'ils disent combien les draperies me fournissaient de
moyens plus aisés pour détacher mes figures de la toile. Je pense au contraire qu'ils me sauront gré de la
tâche difficile que je me suis imposée, pénétrés de cette vérité, que qui fait le plus peut faire le moins. En
un mot, mon intention, en faisant ce tableau, était de peindre les mœurs antiques avec une telle exactitude
que les Grecs et les Romains, en voyant mon ouvrage, ne m'eussent pas trouvé étranger à leurs
coutumes. »
Il convient de rappeler que de l’étude au tableau, le cheminement de David a suivi un processus inverse en ce
qui concerne ce tableau des Sabines dont les études sont mal connues, et que le déshabillage des figures
masculines est progressif. Dans le premier état de l’étude d’ensemble, en 1794, tout le monde est vêtu.
Quand la composition arrive à son terme, la jupette remplace le short pour Tatius et Romulus, la position de
l’épée de Tatius ne cache plus le sexe, seuls sont nus les personnages annexes encadrant la composition.
Une étude récemment passée en vente (dont les jambes ont été refaites par un élève qui précise au dos que
le haut du dessin « est de mon maître David » montre que l’intention définitive était bien de présenter un nu
frontal du personnage de Tatius. Il faut savoir que le baudrier qui cache le sexe sur le tableau aujourd’hui
visible est un repentir, un repeint pour l’exposition du tableau en 1808, traduisant le retour en arrière dans la
société du Premier Empire de l’idée de l’idéale académique antique.
Napoléon se méfiait du nu, par peur du ridicule, il fit cacher la statue de
Canova le représentant en Mars pacificateur, et s’il reste bien une étude de la
figure du Sacre le représentant nu, à l’antique (et se couronnant lui-même
selon la première version voulue par David), le dessin ne sortit pas de l’atelier.
L'atelier de David
Elève de David, Cochereau (qui
mourut assez jeune, en mer, des conséquence d'une dysenterie) a laissé
au moins un tableau très célèbre du premier Atelier de David:Détail du nu dans le tableau de Léon Matthieu Cochereau
"L'atelier de David" produira donc de nombreuses "académies", certaines attribuées aux maîtres ou à ses élèves de façon plus ou moins certaine:
D'autres nus anonymes du début du 19ème siècle:
La liste des élèves de l'atelier de David est de toute façon si longue qu'on aurait peine à l'épuiser
http://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_%C3%A9l%C3%A8ves_de_Jacques-Louis_David
Quelques académies de Wicar
On ne peut pas dire que la carrière de Jean-Baptiste Wicar
ait fait honneur à la peinture. Après plusieurs échecs au prix de Rome, Wicar
présida la commission chargée de piller les Flandres autrichiennes, puis il
récidiva en Italie, constituant à l’occasion une belle collection personnelle
qu’il léga pour partie au musée de Lille, ayant poursuivi dans cette ville la
plus grande partie de sa carrière administrative.
Il laisse quelques dessins d’étude de bonne facture qui
connurent un succès durable par la gravure :
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