mercredi, mars 06, 2019

Platt Lynes Le leg Steward et Kinsey



Autoportrait


Kinsey avait provoqué de rageuses polémiques en publiant en 1948 son étude sur la sexualité masculine. Ses recherches continuèrent sur un plan plus pratique documentées par des bandes cinématographiques.


Platt Lynes Portrait d'Alfred C Kinsey

C'est Glenway Wescott, véritable collaborateur, correcteur et "fournisseur"  qui organisa nombre de rencontres et d'orgies à fin de documentation pour Kinsey. Parmi les couples formés à cette occasion Chuck Howard -recommandé par Wescott- et William Christian “Bill” Miller.

Platt Lynes Miller et Wheeler



Bill Miller par Glenway Wescott

Howard et Miller se rendirent à Bloomington. Leurs performances furent sans doute peu satisfaisante,s Howard avouant plus tard "Ce n'était pas Hollywood!" Il semble que Miller, Wescott et Wheeler entre autres aient été des partenaires sexuels occasionnels de Kinsey.

Platt Lynes Chuck Howard et Ted Starkowski


Kinsey contribua à financer la carrière de Lynes dans le domaine de la photographie érotique en commandant d'abord une centaine de clichés


 
Platt Lynes Mel Fillini et Ted starkowski



Les recherches de Kinsey se poursuivirent tout au long des années 50.
Samuel Steward, Phil Andros pour ses récits érotiques, Philip Sparrow en tant que tatoueur), fut reçu par Platt-Lynes en 1952, sur une lettre de recommandation de Wescott, (qu'il ne rencontrera que deux ans plus tard).

C'était moins de quinze jours après les démêlés de Steward avec Mike Miksche  pour le bien de la recherche sous la direction d'Alfred Kinsey.

Samuel Stewart Polaroïd


La collection de l'institut Kinsey compte plusieurs dessins signés Miksche, avant qu'il n'utilise pour ses dessins ultérieurs le pseudonyme Steve Masters.

Selon Glenway Wescott (1901-1987) :  C'était un genre de géant à la Paul Bunyan [le légendaire bûcheron canadien, sorte d'Hercule nord américain]. Engagé vers sa 20è année, il s'était retrouvé à la tête d'une flotte de 4 à cinq bombardiers, responsable de deux vols par nuit au-dessus de Berlin. A cet âge il n'avait pas encore d'inclination homosexuelle et peut d'expérience avec les femmes. Un des membres de son équipage tomba amoureux de lui et le lui avoua: "C'est n'importe quoi, dit Mike, je ne vais pas te dénoncer. On sera juste copains et on n'en reparlera plus. Il avait ce côté sadique et tyrannique d'un point de vue psychologique. Il voulait dominer tout le monde, c'était sa nature. Il dit à ce garçon qu'il fallait se calmer que c'était une relation idéale, platonique et qu'ils auraient une histoire d'amour sans sexe. Deux ou trois jours après, le jeune homme ouvrit la porte de l'avion en plain vol et se jeta dans le Rhin. Et Michael était hors de lui. je crois qu'il est revenu de la guerre avec ce sentiment de culpabilité et de frustration parce qu'il avait laissé passer l'occasion de finir au lit avec ce garçon".

   Mike Miksche, photographié par Platt-Lynes en 1952


C'est néanmoins Wescott qui recommanda Miksche à Kinsey lorsqu'il voulut filmer des hommes engagées dans des pratiques sado-masochistes. Le partenaire choisi était Samuel Steward et Wescott (qui était effrayé par la liberté de mœurs et l'auto-dégradation volontaire de Steward ) de poursuivre : "Il a fait de nombreux films avec Mikshe, un ou deux que j'ai vus mais la plupart que je n'ai pas voulu voir. Michael était un formidable acteur, il était tellement exhibitionniste".

Wescott avait prévenu Kinsey que "la plupart des jeunes masochistes avaient peur de lui. Ils pensent qu'il finira par tuer quelqu'un." Il avait, peu avant laissé un de ses amants avec plusieurs côtes cassées.

Dans Pages d'une autobiographie Steward écrit:
[Kinsey] me demanda de prendre l'avion de Chicago et fit venir de New-York un "maître" effrayant par sa grande taille et son air mauvais, Mike Miksche, le cheveu en brosse et une personnalité incroyable. Il allait filmer notre rencontre... Ce fut une drôle d'expérience, pendant deux après-midi à Bloomington, la caméra tourna. Kinsey avait préparé Mike en lui faisant boire une demi bouteille de gin... Assis sous un pommier dans le jardin de Kinsey avant que les festivités ne commencent, la perversité et le désir me firent fixer les bottes anglaises marron de Miksche, lacées vers le haut. Je tirai sur le nœud des lacets en lui disant : "Bah, tu ne m'as pas l'air si dur que ça".
C'était évidemment une provocation délibérée, pour laquelle je dus payer le prix fort, encore et toujours durant les deux après-midi qui suivirent. Mike endossait facilement le rôle, chaque fois qu'il entendait démarrer la caméra de Bill Dellenback, sa vigueur se renouvelait...

Mike Miksche par William Dellenback peinture de lumière

A la fin des deux jours, j'étais épuisé, marqué et comateux, tous les muscles en capilotade. Pendant les sessions je n'avais que vaguement conscience des gens qui passaient pour observer de temps en temps, tandis que Mme Kinsey, en vraie scientifique, assistait aux débats, changeant calmement les draps sur le banc de travail.
A la fin de la dernière séquence, alors que je m'étais presque décroché la mâchoire et que je ne pouvais presque plus fermer la bouche, encore moins tenir une cigarette entre mes lèvres, Miksche, subitement furieux me gifla sauvagement d'un allez-retour en me disant que j'étais le plus ridicule suceur de bite qu'il avait jamais rencontré... Plus tard, ce soir-là, Kinsey nous avaient laissé Mike et moi dans deux coins séparés de sa bibliothèque pour lire un peu, quand soudain Mike apparut, les yeux en feu, excité jusqu'à la sauvagerie -après s'être stimulé par la lecture des dactylographes de quelques histoires s/m- et me viola de nouveau sur le sol de ciment froid de la bibliothèque.
Quand Kinsey l'apprit, il commenta en riant: "J'espère que les volets étaient fermés".
Plus tard Miksche confirma les théories de Theodore Reik, Wilhelm Stekel, et Kinsey lui-même selon lesquelles les sadiques étaient peut-être moins équilibrés que les masochistes, puisque Mike, -après avoir tenté de se réformer en se mariant, et échouant- sauta dans l'Hudson River, [fut sauvé] et finit par se suicider."
Samuel Steward Home lightpainting


L'entrevue entre Platt Lynes et Steward prend la forme d'un dîner qui réunit aussi le dramaturge William Inge, et Ralph Pomeroy  qui posait régulièrement pour Cadmus.

Platt-Lynes William Inge 1952

Platt Lynes Ralph Pomeroy 1940


Platt-Lynes, Ralph Pomeroy en pantalon de marin



Les relations entre Steward et Lynes sont immédiatement amicales, elles débouchent sur une correspondance qui se poursuivra jusqu'à la mort de Platt Lynes trois ans plus tard (il n'avait que 48 ans) et qui consiste essentiellement à échanger des histoires érotiques contre des photos (activités extrêmement dangereuses à l'époque du Maccarthysme où le courrier est surveillé). Occasionnellement, Steward adressera des modèles (disponibles sexuellement) à Platt-Lynes, comme John Leapheart, recruté lors de son passage par New York à l'automne suivant.



Lynes lui fera parvenir les photos de la première séance de pose où il avait apparié Lepheart avec un bodybuilder de Boston, Buddy M Carthy à qui il avait demandé de se raser afin que le contraste soit plus saisissant.

Buddy Mc Carthy dans la chambre de Lynes (on reconnaît un morceau du tableau de Cadmus à Stone Blossom) on voit aussi sur la table de nuit ce portrait de Starkowski



 


John Leapheart et Buddy Mc Carthy




Lorsque Steward regagne Chicago, il emporte avec lui nus que lui a donnés Lynes. Steward fait ainsi le récit de son voyage de retour avec les clichés dans sa serviette :
Ah les jolies images! Je mourrais d’envie de les regarder dans le train, plutôt douze fois qu’une, mais je n’ai pas osé, et depuis mon retour, je n’ai pas fait grand-chose d’autre… Le voyage de retour s’est déroulé sans incident, sinon qu’aux alentours de Toledo vers quatre heures du matin, un soldat en civil qui rentrait chez lui (il était grand, et les épaules si large !) me demanda de lui ouvrir sa bouteille d’alcool, ce que je fis car il était ivre-mort, après quoi je lui ouvris aussi autre chose –ce qui le laissa un peu faible, mais heureux. Comment il se débrouilla pour regarder en face sa femme et ses deux enfants vingt minutes plus tard ne me regarde pas, bien entendu.
De même que Platt-Lynes rédige ses réponses au dos des clichés, Steward illustre ses lettres avec la reprise de dessins :





Extrait d’une lettre datée du 7 décembre 1952 au « Cher George, révélateur de beauté » (telle que publiée pour la première fois par John Preston dans l’anthologie Flesh and the World) :

… quelque chose de charmant est arrivé hier au soir. Je connais un jeune cadre qui habite Chicago ouest, et qui comme moi mène une double ou triple vie –c’est un de ces « sauvages » qui m’aime bien car il pense que j’en suis un aussi. Il habite Logan square, parce qu’il y est né, même si le quartier est depuis devenu un des plus « populaires » de la ville, plein de jeunes petits durs m’as-tu-vus à la coupe en brosse, comme Chicago parait en produire à la pelle plus que tout autre catégorie sociale. Il m’a appelé hier pour me dire qu’il venait d’en rencontrer un et demander s’il pouvait l’amener. J’ai répondu « bien sûr, sauf que je venais de barbouiller le mural au-dessus de mon lit représentant des marins en train de baiser des filles et que l’endroit était en bordel. Pas grave, a-t-il dit, et quelques minutes après, les voila. Le garçon avait dix-huit ans, mignon à se damner –habillé juste comme il fallait. Il s’était mis sur son 31, c’est-à dire, une paire de jeans usés à blanc qui lui collaient comme un gant, son blouson de cuir neuf et brillant, un T-shirt bleu marine à manches grises échancré en V sur le cou. Il avait les cheveux très noirs, satinés, très poli, et faillit m’écraser la main en me la serrant. Très naïf encore à propos de la vie H, Wally l’ayant initié depuis peu. Il n’a pas fallu longtemps pour que nous nous déshabillions tous les trois – j’étais assis sur le montant du lit, nu, Wally jambes croisées en plein milieu, et le gamin luttait pour s’extirper de son jean et ôter son jockstrap, quand soudain il se figea et se tournant vers nous dit d’une petite voix d’enfant : « Mince, c’est juste comme si j’étais la dinde de Noël ! » ce qui malgré les rires n’arrêta pas la fête… Nous l’avons renversé sur le lit et j’ai commencé à le sucer pendant que Wally lui remplissait la bouche où il jouit assez vite, puis Wally et moi avons échangé les places tandis qu’une nuée d’étoiles éclatait dans ma tête… Après quoi, le mettant sur le flanc pendant que Wally continuait à le sucer, je lui ai consciencieusement bouffé le cul. Quelques instant après avoir joui, il déclara : « Les gars, vous savez vraiment comment vous occupez d’un mec, j’espère que je pourrais revenir. » Après leur départ je suis resté assis un moment
en frissonnant, réfléchissant sur les deux vieilles tantes que nous étions, utilisant ce garçon –si c’est mal, tant mieux, j’en redemande… Dis moi si tu veux que je remonte un peu plus loin dans le temps, car j’aime écrire ces souvenirs de petits moments d’excitation, et si ça ne te déplaît pas, ce sera un bel encouragement pour moi à me résoudre à les raconter, car –aussi étrange que cela puisse paraître- je suis en réalité comme une faible plante sensitive, très timide et réservé.   88, Sam
 

George Platt-Lynes, Neel Bate

En Mars 1953, Steward annonce à George Platt-Lynes:
... "Thor" (un agglomérat de trois personnes vendant des dessins érotiques sous ce pseudonyme stupide) a pris quatre de mes dessins de motard et les répandra bientôt ) travers le pays, les promouvant dans diverses publications comme Tomorrow's Man, etc. J'ai refait la série de douze obscénités du 'Motard-stoppeur" (tu vois certainement de ce dont il s'agit -le motard et le garçon de ferme dans la grange?) à mon goût, avant d'être frappé par l'heureuse idée d'écrire une histoire pour accompagner ces deux images -dont je t'envoie une copie en espérant que le coup de cœur te fera fondre.
Lequel répond 15 jours plus tard, avant d'annoncer qu'il compte, sentant son état s'aggraver,  confier définitivement à Kinsey tous ses négatifs de photos de nu :
L'histoire que tu as envoyée -eh bien ça a été un succès!.. Encore, encore plus, s'il te plait. Et vite. Glenway Wescott a adoré aussi; il a même voulu l'emprunter pour faire une copie. De la bouche de Neel Bate lui-même, qui, comme tu sais probablement, est l'auteur de la série.
Platt-Lynes connaissait en effet très bien Bate, qui posa plusieurs fois pour lui et à qui il présenta Ernest Henry, qui allait devenir son partenaire définitif (mais non exclusif).



Neel Bate, photographe non identifié



 Platt-Lynes Neel Bate et Ernest Henry



Les appréciations élogieuses de Lynes et de son cercle jouent un rôle déterminant dans l'activité littéraire de Steward qui se met à écrire des histoires pour Lynes. L'une des premières est  Le Motard, qui deviendra, 15 ans plus tard après développement le premier chapitre de The Joy Spot.

Quand aux clichés collectés par Steward ils formeront la base dans les années 80 des premières publications de photos inconnues dont Lynes, une fois que son cancer des poumons atteignit sa phase terminale, détruisit les négatifs. Ce qu'ignorait Samuel Steward c'est que Lynes, après plusieurs années de collaboration avec Kinsey, avait certes détruit tous les négatifs de ses photos commercialisables mais légué à l'institut 590 tirages originaux et un ensemble de 2000 négatifs qui constituent toujours la plus importante collection de son travail. Au terme d'un accord passé (toujours en vigueur) entre Kinsey et Lynes, aucun des noms des modèles ne devaient être révélés. Comme Bob Mizer Platt Lynes avait établi un code secret permettant de révéler ce qu'il savait des préférences des modèles.

De son vivant Lynes n'avait pu faire paraître que quelques rares photos de nus masculins, toutes  dans des revues européennes, notamment  Der Kreis sous le pseudonyme Roberto Rolf.


 Roberto Rolf



 


Platt Lynes à Charles Welti, 1er September 1953
"N'oubliez pas qu'en ce qui me concerne je demeure pour tout contact Roberto Rolf et que mon adresse ne doit pas être divulguée".


 le 26. April 1954
"Adressez toutes les copies de Der Kreis à mon nom. Continuez à signer mes photographies dans Der Kreis Roberto Rolf. "
28 juin 1954
"Cher Monsieur Welti je vous envoie aujourd'hui par courrier exprès 24 photographies supplémentaires pour Der Kreis. Six d'entre elles sont réalisées avec une nouvelle tecnique qui m'a occupé depuis longtemps. Elles sont assez différentes de mon travail tel que vous le connaissez. J'espère qu'elles vous plairont."
24 août 1954
" Avez vous songé à publier un volume de mes photographies, peut-être sous mon nom... Je pourrais fournir cent nouvelles photographies ou plus, en supplément de ce que vous avez déjà publié. Je pense que nous pourrions, sans difficulté établir un contrat en ce qui concerne les copyright et les revenus ; ce pourrait être une occasion profitable à nous tous".
 

Ce projet ne verra pas le jour, le coût estimé à 10 000 francs suisse excédant les possibilités d'investissement des directeurs de Der Kreis.



Porfolio

 

 







Identité non communiquée



Bill Blizzard sleeping

 
















 Alfred Herrick 1940

























Dick Beard


Dick Beard

 Don Cerrulli 1952






























































Richard Schafer

Richard Schafer

Schafer










Identité non communiquée






Légionnaire photographié en 1955 dans la rue à Paris quelques semaines avant la mort de Platt Lynes


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