Charles Le Brun (1619-1690) portrait en creux

Nicolas de Largillière peignit en 1686 un portrait de Lebrun: c'est précisément l'année où Largillière fut reçu à l'Académie dont Lebrun était le directeur. Largillière finirait par lui succéder à ce poste tout juste un demi-siècle plus tard:

Dans le désordre d'atelier, aux Gobelins peut-être, on aperçoit à droite la même statuette qu'on retrouve dans l'autoportrait de Largillière, et qui était également présente dans le portrait que fit Le Brun de François Duquesnoy (L'adonis antique que Dusquesnoy restaura pour Mazarin?)

Dans le portrait de Largillière, Le Brun pose devant le modello de sa fresque de la Galerie des Glaces La Franche-Comté conquise pour la seconde fois.

On trouvera ici http://www.charleslebrun.com/site_french/pageacceuil.htm les explications nécessaires aux raisons pour lesquels le plus grand peintre du 17ème siècle reste pratiquement inconnu, sa réputation lui aillant mieux survécu que son œuvre (ainsi qu'une analyse fort utile de la symbolique de ce tableau).

Je cite:
Ce qui a été néfaste pour la popularité de LeBrun après sa mort, c'est que le ministre Louvois, successeur de Colbert, a donné l'ordre de faire appliquer un scellé sur toutes ses œuvres, sous prétexte que la production du Premier Peintre devait être consacrée au Roi. La plupart des œuvres du maître furent saisies et ainsi rapatriées dans les voûtes du Louvre, inaccessibles au public pendant des siècles. Il en résulte que partout dans le monde, sauf en France, la présence des œuvres de Le Brun est quasi inexistante.


Tous les dessins de Le Brun, qui constituent la partie la plus importante et novatrice de son legs sont donc restés en France, mais en ce qui concerne leur visibilité, la situation n'a guère changé, et cela dort dans des tiroirs rarement ouverts par d'autres que par les spécialistes autorisés. Ce qui demeure le plus exposé de Le Brun sont ses peintures pour la Galerie des Glaces, ce qui ne qui saute aux yeux le plus facilement dans cet ensemble, le sujet-même de la décoration (lointaine des plafonds) n'étant pas facile à assimiler par sa complexité symbolique et le mélange d'histoire et d'allégorie qui y est représenté. 


Pour mieux saisir la démarche qui mène chez Le Brun de l'esquisse à l’œuvre achevée, revenons au brouillon: 

La différence la plus frappante avec la réalisation définitive est la disparition du dieu Mars portant l'écusson royal -remplacé par une Victoire suspendant des lauriers dans un palmier!-, lequel marchait dans l'esquisse dessinée, sur le corps de l'allégorie fluviale (le Doubs, et un guerrier vaincu) alors que la figure défensive du soldat portant bouclier à droite n'existait pas encore:

Le roi, déjà en tenue d'Alexandre, adoptait une pose beaucoup moins représentative de la grandeur du pouvoir, mais plus dynamique et "humaine", tendant la main aux "villes" à reconquérir. Les ennemis, et parmi eux le "lion espagnol" participent au premier plan, ils ne sont pas encore vaincus, comme le souligne Hercule, au dessus du roi, lui aussi en plein combat, alors que dès l'esquisse peinte il se contente de montrer la voie de la victoire, dominant les derniers ennemis au sein d'un espace où ils sont désormais retranchés parmi les "vents et les rigueurs de l'hiver".

Hercule ouvrant la voie à Louis XIV costumé en Alexandre est un thème récurrent des fresques de Le Brun:
Les études du roi appuyé sur le bâton de commandement sont nombreuses:

Etudes de la figure du Roi debout:

L'étude de la figure d'Hercule pour ce tableau-là a donné lieu à deux pastels, technique que Le Brun n'utilise pas fréquemment:

La présence d'Hercule dans la Grande Galerie de Versailles n'est pas surprenante, c'était même le premier thème décoratif envisagé et dont les études furent poussées assez loin: voici un détail de ce qu'ait pu devenir la décoration de la voute:

Le thème d'Hercule, en ce qui concerne la décoration murale avait déjà été traité par Le Brun, pour la galerie de l'Hôtel Lambert et il fut décidé que le sujet principal devait être l'illustration de l'histoire du Roi , à travers des fresques telles que Le Roi gouverne par lui-même ou Le passage du Rhin en présence des ennemis. Mais dans ces deux fresques Hercule est toujours présent à l'arrière plan, alors que la plupart des dessins destinés à l'Hotel Lambert sont des études de faux-stucs adoptant la perspective de statues vues par dessous.

Modello de Le Roi gouverne par lui-même:

où l'on distingue au-dessus du dais cette figure d'Hercule:

Figures d'Hercule pour la galerie de l'Hotel Lambert:

Quelques autres figures allégoriques:

 Le Rhin du Passage du Rhin

Mercure

Bacchus

Bien avant le début de sa carrière au Louvre et à Versailles, Hercule est déjà le sujet d'un des rares tableaux de chevalet de Le Brun (commande de Richelieu) Hercule terrassant Diomède:

Le combat d'un (jeune) Hercule contre les centaures est également le sujet d'un autre tableau de chevalet isolé de Le Brun:

Projets de fontaines d'Hercule gravées par Audran d'après les modèles de Le Brun: